La consommation de substances psycho-actives peut être un sujet délicat à aborder tant pour le patient que pour son médecin. C’est pourquoi il importe de développer de bonnes pratiques relationnelles, qui permettent un dialogue constructif et favorisent, si besoin, une prise en charge dans les meilleures conditions possibles.
Pour toute substance psychoactive, on considère 5 catégories d’usage :
Usage simple | Conduite d’alcoolisation qui ne pose pas de problème tant médical que psychologique ou social, respectant les seuils de l’OMS et hors situations à risque |
Usage | Conduite d’alcoolisation qui ne pose pas de problème tant médical que psychologique ou social, respectant les seuils de l’OMS et hors situations à risque |
Usage à risque | Le risque peut être chronique ou aigu.
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Usage nocif | Toute conduite d’alcoolisation caractérisée par :
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Tableau extrait du texte court des Recommandations de pratique clinique de la Société française d’alcoologie (SFA) et de la Société française de médecine du travail (SFMT), mars 2013 : « Dépistage et gestion du mésusage de substances psychoactives (SPA) susceptibles de générer des troubles du comportement en milieu professionnel».
* verre = verre standard ; voir la définition du verre standard
Rechercher des facteurs de gravité
Interroger le patient sur :
Source : « Repérage précoce de l’usage nocif de Cannabis » Repères pour votre pratique, INPES
Différentes situations peuvent faire rechercher une éventuelle consommation de substances psycho-actives, par exemple, et de façon non spécifique et non exhaustive :
Substances psycho-actives | Signes d'intoxications aigües et de consommations excessives |
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Alcool |
Ivresse : excitation psychomotrice, ébriété, dépression. Ivresse pathologique : trouble du comportement, agitation, agressivité. Coma éthylique. HTA, haleine oenolique, tremblements, pyrosis, fatigabilité, irritabilité, plaintes somatiques multiples… |
Cannabis | Conjonctivite, ivresse cannabique, hallucinations, agitations, illusions sensorielles, hypotension |
Opiacés |
Myosis, ralentissement de la fréquence respiratoire ; diminution de la fréquence cardiaque, hypotension. Signes de manque : bâillement, larmoiement, hypersudation, signes digestifs, douleurs, angoisse. |
Cocaïne, amphétamines, crack | Mydriase, dilatation pupillaire, nervosité, hypertension artérielle, tachycardie, attaque de panique, hyperthermie. |
Hallucinogènes | Mydriase, hypertension, hyperthermie, vasodilatation au niveau du visage, anxiété, état paranoïaque, dépersonnalisation, illusions sensorielles... |
Solvants | Très variable selon les produits mais prédominance des signes neurologiques (incoordination, confusion, convulsions) et cardiaques (troubles du rythme), apnée… |
Tableau tiré du texte court des Recommandations pour la pratique clinique de la Société Française d’Alcoologie (SFA) et de la Société Française de Médecine du Travail (SFMT), mars 2013 :« Dépistage et gestion du mésusage de substances psychoactives (SPA) susceptibles de générer des troubles du comportement en milieu professionnel. » www.sfalcoologie.asso.fr/download/AA2013-1_RPCtextecourt.pdf
Eléments complémentaires sur le cannabis : principaux effets à court et long terme
Cannabis | Aigu | Chronique |
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Cardio-Vasculaire | Tachycardie, palpitations, réduction de la tolérance à l’effort chez le coronarien, hypertension, vasodilatation périphérique, hypersudation, céphalées | Hypotension, bradycardie, artériopathie, majoration du risque d’infarctus |
Broncho-Pulmonaire | Bronchodilatation transitoire, hyperréactivité bronchique, toux… | Bronchite chronique, toux, laryngite |
Cognitifs | Altération de la mémoire de travail, trouble attentionnel, trouble de la perception sensitivomotrice, allongement du temps de réaction, altération des performances lors de la réalisation de tâches complexes… | Altération de la mémoire à court terme, baisse des performances verbales ou mathématiques… |
Tableau tiré du texte court des Recommandations pour la pratique clinique de la Société française d’alcoologie (SFA) et de la Société française de médecine du travail (SFMT), mars 2013 : « Dépistage et gestion du mésusage de substances psychoactives (SPA) susceptibles de générer des troubles du comportement en milieu professionnel ». http://www.sfalcoologie.asso.fr/download/AA2013-1_RPCtextecourt.pdf
Il existe différents questionnaires pour interroger les consommations :
Plus les consommations sont précoces, intenses, régulières, multiples et en solitaire et plus le risque de dommages augmente.
De nombreux outils spécifiques sont disponibles sur les sites de l’Inpes et de la Fédération Addiction.
Dès lors que la consommation à risque est repérée/évaluée, il est recommandé de mener une « intervention brève », technique validée en pratique clinique, qui comprend les étapes suivantes
Cf.Outil d’aide au repérage et à l’intervention brève de la HAS, décembre 2014
L’écoute active ou la relation d’aide constituent les fondements des bonnes pratiques relationnelles et favorisent une alliance thérapeutique
La relation d’aide repose principalement sur :
En pratique, il s’agit de :
Pour conclure : Etre écouté avec bienveillance et sans jugement suffit souvent au patient à trouver sa propre voie.
Un acronyme en Anglais, le FRAMES, permet de mémoriser les différentes étapes de l’attitude adaptée pour pratiquer l’intervention brève.
Identifier à quelle étape se situe le patient permet d’adapter le contenu de l’entretien :
Stade | Signification | Attitudes pour accompagner le changement |
---|---|---|
Pré-contemplation | La personne n’a pas identifié le problème | Faire naître le doute ; donner des informations ; instaurer la confiance |
Contemplation | « J’ai un problème; il faudrait faire quelque chose » | Créer une "balance décisionnelle" Explorer l’ambivalence |
Préparation | « J’ai un problème; je vais faire quelque chose » | Clarifier les objectifs ; lever les obstacles; planifier un programme d'action |
Action | « Assez parlé… j’agis ! » | Accompagner le patient dans les étapes du changement |
Maintien | Tenir bon, rester vigilant ! | Aider à identifier et utiliser les stratégies de prévention de la rechute |
Rechute | « Que m’enseigne-t-elle? » | Aider à retourner au stade de contemplation en évitant la culpabilité |
Source : Prochaska, DiClemente 1992
Faire s’exprimer le patient sur les aspects bénéfiques et délétères de la consommation. Exemple de balance décisionnelle pour l’alcool :
Le travail est un facteur protecteur vis-à-vis des consommations de substances psychoactives (la prévalence des consommateurs est plus importante chez les personnes inactives ou précaires que les chez les personnes en CDI).
Cependant, le travail peut aussi initier, favoriser ou renforcer la consommation de ces substances. Tous les secteurs d’activité sont concernés par cette problématique. La vigilance doit être de mise pour des patients exerçant certains métiers à risque.
Il convient d’interroger son patient sur :
a. Les facteurs de risque liés au travail
Les risques sont majorés pour certains postes de sécurité. Exemples de questions à poser :
b. les consommations médicamenteuses du patient
Le médecin doit :
L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) publie régulièrement la liste des médicaments susceptibles d’altérer la vigilance, reconnaissables grâce à un pictogramme décliné en trois couleurs (jaune, orange, rouge) : éduquer le patient à la reconnaissance de ces pictogrammes.
Particularités des personnes sous traitements de substitution aux opiacés
Les personnes sous méthadone, buprénorphine haut dosage ou BHD (Subutex et génériques, buprénorphine + naloxone (Suboxone)) peuvent exercer tout type d'activité professionnelle. Jurisprudence.
La vigilance et la mémoire immédiate pouvant être légèrement altérées à l'initiation du traitement, un arrêt maladie pourra se justifier durant cette période et il conviendra d’en informer le patient.
Au delà, le médecin devra seulement être attentif à un mésusage éventuel (non respect de la posologie, polyconsommations...).
Les recommandations de la Direction Générale de la Santé (DGS) (circulaire du 16/5/2007 relative à l’organisation du dispositif de prise en charge et de soins en addictologie) et de la Société Française d’Alcoologie, préconisent une prise en charge du patient dépendant en réseau, qui s’articule autour du « trépied » médecin généraliste, CSAPA, et médecin du travail si le patient est salarié.
Le médecin généraliste :
Les principales structures spécialisées en addictologie sont :
Consulter l’annuaire national des structures spécialisées en addictologie http://www.drogues-info-service.fr/Recherche-professionnelle-multicriteres
Le médecin traitant ou le médecin du travail propose au patient une consultation dans un centre de soins spécialisé :
Autres soutiens possibles :
Ecoute Alcool | Ecoute Cannabis | Drogues Info Service |
Tél. 0811 91 30 30 | Tél. 0811 91 20 20 | Tél. 0800 23 13 13 |
www.drogues-info-service.fr - Rubrique « Vos questions / Nos réponses » |
Le médecin du travail écoute le salarié et analyse son poste de travail.
Il peut :
Le médecin praticien et le médecin du travail sont tenus au secret professionnel. Le médecin praticien peut communiquer des informations au médecin du travail, avec l'accord de son patient ou par son intermédiaire en lui remettant un courrier.
Quand contacter le médecin du travail?
Comment contacter le médecin du travail ?
Ne pas hésiter à adresser le patient au médecin du travail à tout moment. Le salarié peut demander une visite médicale occasionnelle s’il est en activité, ou une visite de pré reprise s’il est en arrêt.
Coordonnées du médecin du travail :
Le médecin du travail est l’acteur pivot à solliciter pour maintenir un salarié dans son emploi, s’il est sollicité précocement. Les autres acteurs du réseau de maintien dans l’emploi apportent leur aide complémentaire : médecin conseil, assistantes sociales, Cap Emploi.
Voir la fiche Maintien dans l’emploi.