Le principal enjeu thérapeutique devant une dermatite de contact professionnelle est d’éviter que la maladie ne se pérennise. L’identification précoce de l’agent causal peut permettre son éviction et éviter ainsi le passage à la chronicité.
Contacter le médecin du travail est utile (prévention primaire et secondaire).
Interrogatoire
Dans la survenue des allergies professionnelles, les facteurs liés à l’individu (antécédents atopiques familiaux et personnels) ainsi que les facteurs environnementaux (profession, loisirs, bricolage..., vêtements, lessives, produits de toilette, médicaments, cosmétiques…) sont également à considérer. Le diagnostic peut être posé en fonction de l'aspect et de la localisation des lésions.
Pensez à poser les questions suivantes :
Où la dermatite a-t-elle débuté ?
Les localisations principales évoquant une origine professionnelle sont les mains (plus de 90% des cas, surtout le dos des mains, les espaces interdigitaux et les faces antérieures des poignets) et toutes les zones cutanées pouvant être concernées par contact direct ou indirect au cours des actes professionnels / les zones découvertes si manipulation de produits vaporisés ou si travail en extérieur.
Quand la dermatite a-t-elle débuté et comment évolue-t-elle ?
Les poussées sont rythmées de façon nette par les contacts. La dermatite s'améliore pendant les vacances / les périodes d’arrêts du travail et récidive dès la reprise du travail.
Quelle est la profession de votre patient ?
Les professions les plus exposées sont : le nettoyage, le secteur de la construction, les coiffeurs, les professions médicales et paramédicales, les travailleurs des métaux, de la mécanique et de l’électronique, les manipulations de matières plastiques et l’agriculture..
Votre patient porte-t-il des protections? A-t-il des doutes sur les produits qu'il utilise? Y a t-il eu un changement de produit récemment dans son entreprise?
Diagnostic
Le contact de la peau avec des substances utilisées en milieu de travail peut entraîner deux types de dermatites :
- Les dermites irritatives ou caustiques (80%)
- Les dermites de contact allergiques (20%)
- Les allergies retardées (eczéma de contact) > 90% des cas
- Les allergies immédiates, rares (urticaire) < 5% des cas
Un type de dermatite n’exclut pas l’autre.
Dermite irritative
C’est une réaction inflammatoire non immunologique de la peau à un agent irritant. Selon l’aspect clinique, qui peut être très varié, on distingue 4 types d’irritation cutanée :
- Les réactions irritatives : superficielles (derme), plutôt monomorphes (rougeur, desquamation, vésicules, pustules…)
- Les brûlures chimiques (profondes) : érythème douloureux, vésicules, nécrose
- La dermite irritative de contact aiguë, souvent liée à des frottements (souvent macules puis papules puis vésicules)
- La dermite irritative de contact chronique, difficile à distinguer de la dermatite allergique.
Distinguer la dermite irritative et l’eczéma de contact allergique
Critères de distinction | Dermite irritative de contact (80%) | Eczéma de contact allergique (<20%) |
Mécanisme | Non allergique | Allergique |
Fréquence | Collective (plusieurs individus atteints simultanément) | Individuelle |
Délai d’apparition | Rapide | Il faut un contact préalable de quelques jours avec la substance (≥ 10 jours) (période de sensibilisation). L’eczéma apparaît 1 à 2 jours après tout nouveau contact. |
Symptômes subjectifs | Sensation de brûlure | Prurit quasi-constant (démangeaisons) |
Aspects cliniques | Plaques érythémato-squameuses | Phase aigue : érythème, vésicules ± suintement, oedème Phase chronique : croûtes, desquamation |
Limite des lésions | Nette et réduite à la zone de contact ou d’utilisation d’outil | Peut déborder la zone de contact, avec des bords émiettés (le plus souvent, dos des mains, doigts). Possibilité de lésions à distance (face antérieure des poignets, avant-bras). |
Bilan allergologique par tests épicutanés | Négatif ou aspect d’effet irritatif | Positif à la substance responsable de l’allergie. |
Evolution des lésions | Pas d’évolution vers la chronicité après arrêt de l’exposition | Possible évolution vers la chronicité malgré l’arrêt de l’exposition (1 cas sur 2 pour l’eczéma des mains professionnel) |
La dermite de contact irritative fait le lit de la dermatite de contact allergique ;
Les personnes atopiques sont plus à risque de développer une irritation, puis, en l’absence de prévention, une dermatite de contact allergique (déficit du film lipidique cutané, peau sèche, perte en eau).
Dermatite allergique : eczéma de contact ou urticaire ?
Critères de distinction des dermatites allergiques
Type | Eczéma de contact allergique (> 90%) | Urticaire de contact (< 5%) |
Définition | Réaction allergique cutanée de type retardée, apparaissant de 24 à 48 heures après le contact avec l’allergène*. Une irritation cutanée (due à un contact avec des produits irritants) peut présenter parfois le même aspect clinique. | Réaction allergique cutanée de type immédiat, apparaissant dans les minutes après le contact avec l’allergène |
Agent sensibilisant responsable | Substances de bas poids moléculaire. Par exemple : colorants, conservateurs, additifs du caoutchouc, résines, métaux, agents anti-microbiens… | Allergènes : le plus souvent des protéines d’origine animale ou végétale Par exemple, le latex naturel |
Evolution | Possible évolution vers la chronicité | Evolution favorable après éviction |
*Pour l’eczéma, lors du 1er contact, une période de latence sans symptôme est observée (période dite de « sensibilisation »).
Il existe une forme particulière de dermatite professionnelle appelée dermatite de contact aux protéines.
Penser à une association possible avec une rhinite ou un asthme professionnel.
Autres dermatites liées au travail
Attention ! Tout aspect d’eczéma des mains ne veut pas forcément dire allergie ou irritation dues à des substances utilisées en milieu professionnel. Il peut s’agir d’autres dermatites, qui peuvent être aggravées par les conditions de travail ou bien être d’origine professionnelle sans être des dermatites de contact :
- Eczéma atopique ;
- Psoriasis ;
- Dermatites par traumatismes répétés (anciennes dermites traumitératives) beaucoup plus fréquentes que l’eczéma (dermatite des ménagères ou des métiers du bâtiment ;
- Dishydrose ;
- Dermatites par photosensibilisation. On doit distinguer deux types de réaction : photo-allergique et photo-toxique.
- Aggravation d’un eczéma ou d’une urticaire par tout facteur irritant le système nerveux (stress, contrainte, fatigue, surmenage) ;
- Mycoses cutanées TRG 46 / TRA 15, unguéales et péri-unguéales TRG 77 / TRA 15, pyodermites, anomalies de la coloration cutanée et autres dermatites professionnelles non allergiques, rares ;
- Dermatites allergiques consécutives à une infection contractée sur le lieu de travail, rares (brucellose chronique) TRG 24 / TRA 6, hépatites virales B et C TRG 45 / TRA 33.